Le sang, c’est la vie. Mais la vie, ce n’est pas forcément que le sang. Atteignant le bord de l’eau, mon pelage était tout sec, tout bizarre. Une forte odeur d’algue et de sel l’envahissait, ce qui me donnait un air crade, dégueulasse. Je n’arrêtais pas de me secouer, de me gratter, de me lécher. Cet air me donnait envie de gerber. Goutant cette eau totalement dégueulasse, je me rendis alors compte qu’elle avait un très fort goût salé et que j’allais bientôt vomir. Me retenant de vomir partout, je reculai à pas empressés et ne pus patienter d’avantage. Le dégout l’emporta, cette fois ci. Je me retournai et vomi dans le sable. Beurk ! Je ne gouterais plus jamais à cette eau salée immonde ! Je n’avais nulle part où me rincer à l’eau douce. Nulle part où me désaltérer à l’eau douce, nulle part où vivre. Je ne savais pas quoi faire à présent. Je voulais rentrer chez moi mais je ne savais pas comment. J’étais seul à présent et personne ne pouvait m’aider, sur ce coup là. Et de toute façon je m’en fous des autres. Ceux qui veulent m’aider tout ça parce que je suis petit et sans défense, pff. Rien à battre. Maintenant je mène ma vie à deux pattes, même si j’ai quand même Maman Megan à mes cotés pour me protéger et me nourrir, elle reste quand même ma mère, hein. Je commençais à me rouler dans le sable crasseux pour avoir une forte odeur repoussante. Mon regard balayait ce paysage qui offrait une vue surprenante. Je me réjouissais déjà à l’idée de rentrer à la maison. Maman devait certainement m’attendre vu le nombre de fois auquel elle s’était inquiétée de mes disparitions sans la prévenir. Longeant le rocher aquatique, mon pelage laissait une marque dorée. Il s’agissait simplement du sable qui s’était collé à moi lorsque je m’étais roulé dedans pour m’imprégner d’une odeur d’algue, forte repoussante. Je fermais les yeux, m’imaginant devant une carcasse entière d’élan. Les filles étaient toutes autant que les autres impressionnées par mes prouesses et moi, je m’en vantais. Soudain, une vint me faire une léchouille sur la joue. Je fus flatté par tous leurs commentaires admiratifs et là, je rouvris les yeux. J’étais toujours entrain de longer le rocher, mais je m’arrêtais net et me dis que tout cela n’était qu’un fantasme après tout. Mais un jour ce sera réel et tous ceux qui m’auront méprisés, insultés de moins que rien seront à mes pattes et je me vengerais. Je m’allongeai au sol, sous le rocher, mais à l’extérieur de celui-ci et fermais les yeux. Je m’imaginais alors dominer les Rubis, et lorsque soudain dans mon cauchemar, maman Megan apparut en tant qu’esclave de ma meute. Je ne pus me réveiller car je m’étais endormi, et c’est alors là que je vis la une atroce souffrance cauchemardesque.

C’était la première fois que je faisais des cauchemars où maman y participait. Je me voyais la dominer, la frapper et la martyriser. Elle couinait et se soumettait, tandis que je ricanais sadiquement en ordonnant à mes loups de l’abattre sur le champ. Soudain, je vis dans le regard de Megan une louve étonnée du comportement de son fils avant qu’elle me lance un regard dépité et écœuré. A ce moment là je sursautai et poussai un gémissement sourd et strident. Je regardais autour de moi et vis une louve blanche assisse à mes cotés. Elle me regardait de ses yeux bleus turquoise magnifiques. Mais malgré sa beauté je ne pouvais m’empêcher de la rabaisser. Je n’avais pas besoin d’elle pour m’aider à me sortir de ce cauchemar atroce. Je la regardais et hochai la tête étrangement, j’étais intrigué par sa venue ici. Je me mis à grogner doucement en signe de repoussement, mon odeur n’avait pas suffi pour repousser mes congénères ? Dans ce cas je n’avais pas d’autres choix que de la faire déguerpir d’ici. Mais avant je voulais connaître son identité pour que si je la revois la prochaine fois je lui dirais qui je suis. Je la regardais et fit tout en hochant la tête.

- « T’es qui toi ? Mon odeur n’a pas suffi pour te repousser ?! »

-"Mon nom est Lou, ma truffe ne fonctionne plus depuis bien longtemps, c'est peut-être pour ça que je ne sens pas ton odeur. Et moi, je peux savoir à qui j'ai l'honneur de m’adresser ?"

Je voulais à tout prix savoir qui était-elle, cette louve de nacre. Elle ? Sa truffe ne fonctionne donc plus depuis déjà bien longtemps ? Mwais si elle le dit. Mais cela n’empêche pas le fait que je reste perplexe à ce sujet là, hein. Je la reniflais, je voulais savoir de quelle meute elle appartenait. Aucune odeur que je connaissais. Elle devait certainement être une solitaire, dans ce cas là. Je m’arrêtai et la regardais droit dans les yeux, placé devant elle je restais bouche bée quand j’entendis son nom. Lou, j’adore son nom. Si j’ai des gosses plus tard et si j’ai une fille elle s’appellera Lou ! Bref. Je me mis à grogner brusquement avant de lui lancer sèchement et durement.

-« Nan, t’as pas le droit. Je marquai une assez longue pause avant de soupirer et de continuer. Je m’appelle Deamon. Tu viens faire quoi ici ? »

Je puais le cadavre mélangé à une odeur nauséabonde. Mon pelage était gras et du sable s’y logeait. Dégoutant, vraiment dégueulasse. Je ressemblais à un louveteau venant des poubelles tellement je puais. Lou était resté assise, devant moi. Elle continuait de me regarder de ses yeux bleus tandis que moi je l’harcelais de questions. Je me grattais par ci, me grattait par là pour essayer en me secouant d’enlever un maximum de sable infiltré dans mon pelage. C’est désagréable ! Très ! Il y avait, dans le ciel les rayons du soleil qui perçaient les nuages. Ils m’atteignaient et m’arrivaient jusqu’aux yeux. Décidément, ce n’était pas mon jour ! Je fis un signe de la tête à Lou quand celle-ci me dit qu’elle se baladait comme tous les autres loups pouvaient le faire. Je me réfugiais aussitôt dans le rocher aquatique. Il y avait trop de soleil à mon goût et c’est alors que je découvris une sorte de mare, où du moins une énorme flaque d’eau douce. Youpi ! Aurais-je dis, mais hélas, cette sois disant marre était infestée de têtards horriblement laids, et comme je déteste les têtards, je ne peux pas me rincer à l’eau douce. Mais et puis ce ne sont que des minables animaux répugnants. Je me rince dedans sans me dire qu’il y a des bébés grenouille dedans. Je ferme les yeux et serre les dents avant de ressortir tout propre, enfin c’est déjà mieux que tout à l’heure. Je ne savais pas si Lou m’avais suivie où non et puis je m’en foutais après tout. Je regardais derrière moi et la vis alors. Soudain je lui dis.

-« Lou est-ce que tu sais pourquoi je peux pas accompagner maman dans ses mésaventures ? »

Il était tant que j’ajoute des gens dans mon répertoire, moi. Je ne m’étais pas fait énormément d’amis depuis que je suis né et cela me bloque beaucoup. Je n’avais rencontré que très peu de loups et je manquais un peu d’amis, ce qui pouvait être assez mal vu par les autres, vous ne trouvez pas ? Mais bon ce n’est que le début de ma vie, enfin presque. Je n’ai que six mois vous savez, et à mon âge je crois que c’est un peu normal de pas avoir une tonne d’amis. Lou me disait que maman voulait me protéger. Mais non elle m’embête, c’est juste qu’elle ne veut pas que je sorte tout seul et que je me fasse enlever par ces bolosses de loups. Pff elle me sous-estime, voilà tout. Il se faisait tard, tout à coup. Ah mais non quelle cloche ! C’est juste qu’il y a un nuage qui cache le Dieu Soleil ! Je me collais au rocher aquatique pour que celui-ci s’imprègne de mon odeur. En regardant Lou qui était assise à mes côtés je lui souriais avant de l’entendre parler. Je vous ai déjà dit ce qu’elle me racontait, regardez plus haut vous ! Elle disait que maman voulait me protéger. Oups désolée, en fait j’ai oublié quelque chose. Lou me demandait le nom de ma mère. Ça ne la regardait pas mais vu qu’elle avait l’air bien sympathique je n’allais tout de même pas resté là à croiser les pattes. Je lui dis alors.

-« Elle s’appelle Megan et c’est la dominante des Rubis. Tu ne t’ennuyais pas toi ? En tant que solitaire ça doit être dur d’être tout seul tout le temps. Moi je m’ennuie et pourtant je suis dans une meute. On fait quoi là ? Parce que moi je m’ennuie. »


C’est vrai quoi. Je m’ennuyais un peu à parler comme ça. Je ne savais pas quoi faire. Faire mumuse avec les mottes de terre ? A quoi ça me servira ? A me salir encore plus et rien d’autre. Je ne savais pas quoi faire. Je lâchais alors un long soupire avant de regarder Lou dans les yeux.

-« Dis Lou tu ne veux pas que l’on aille rejoindre maman ? Tu pourras faire connaissance avec elle et parler ? Allez, s’il te plaît ! »