Une superbe louve au pelage clair traversait la plaine. Elle avait une démarche incertaine et jetait plusieurs coups d'oeil en arrière. Cette solitaire venait tout juste de quitter sa meute et ses anciennes terres. Elle état donc perdue au milieu de ces paysages. Ne sachant pas vraiment où elle allait, la blanche entra dans une énorme jungle. Les couleurs vertes pétantes lui arrachèrent quelques secondes d'attention. Puis elle reprit son chemin en observant la faune et la flore. Son museau frémissait à chaque pas. Elle étudiait bien sa route, essayant d'assimiler les dangers. A plusieurs reprises, elle tomba sur des serpents et des araignées venimeuses. Elle les balayait d'un coup de patte, trop déterminée pour se laisser faire avoir pas une forme d'intelligence si primitive. Visiblement, la louve avait un but. Et si quelqu'un ou quelque chose venait à l'en empêcher, Dieu sait ce que vous endurerez. Elle releva brusquement la tête à cause d'un cri. Elle vérifia aussi la position de l'astre solaire. Il ne fallait pas qu'elle se trouve ici en pleine nuit. Voilà bien sa problématique du moment. Plus elle s’enfonçait à travers la végétation dense, plus elle risquait de ne pas retrouver la sortie. Tous les loups qui avaient bon sens auraient fait demi-tour depuis longtemps. Mais c'était sans compter sur elle. Elle savait pertinemment les risques qu'elle courait, et malgré ceci, elle marchait candidement. Parce que de toute façon, elle finirait bien par arriver de l'autre côté un jour. Elle avait émis ce raisonnement car elle savait que la terre était ronde. Un grondement interrompit sa réflexion. Elle essayait en vain d'en trouver l'origine. La bête avait l'air en colère et de taille. A ce moment-là elle se fit toute petite. Oh, si elle n'avait pas eu d'handicap, c'est sans crainte qu'elle l'aurait affronté. Mais le truc, c'est qu'elle avait une côte cassée. Pendant son voyage jusqu'à Wolf Temporal, elle s'était bien battue. En général sur des coups de tête. Elle remarqua des mouvements souples dans les arbres. Quand elle vit le prédateur, elle eut presque une crise cardiaque : une panthère noire avec une taille respectable. * Si seulement je pouvais parler sa langue... * Une pensée idiote dans une situation comme celle-ci ça lui arrivait toujours. Tantôt elle préférait les pourparlers, tantôt elle réglait ça à coups de dents et de griffes. Elle hurla quand le félin manqua de lui sauter dessus. La louve blanche observa terrifiée son adversaire. Quand elle revint à la réalité, elle s'enfuit si vite qu'on ne voyait d'elle qu'un éclair blanc. Ses pattes commençaient déjà à se tordre de douleur. Et pour ne rien arranger, sa plaie menaçait de s'ouvrir à nouveau. La panthère ne montrait aucun signe de faiblesse et semblait très excitée par ce combat. Alors que la course débuta, la claire sentit la présence d'un autre loup. Elle eut un soupir de soulagement. Celui-ci se transforma en un cri de stupeur quand elle vit devant elle une falaise. Elle fit de son mieux pour se stopper et regarda la tueuse se rapprochait à grande vitesse. La belle ferma les yeux attendant qu'on l'achève.

Notre belle louve attendait sa fin. Jeune, elle s'était déjà penchée candidement sur la question. " Comment vais-je mourir ? " Maintenant, elle pensait l'avoir sa réponse. Elle secoua la tête comme pour chasser ces pensées. L'attente lui parut anormalement longue. Elle dressa une oreille et entendit des bruits de combat. Elle ouvrit ses beaux yeux et observa stupéfaite un mâle faire tomber la panthère dans le ravin. La belle se pencha au-dessus du vide pour regarder la chute du félin. Lui n'aurait jamais pu se douter d'une fin comme celle-ci. Elle frissonna en écoutant la bête rugir de désespoir. Ôter la vie ne l'embêtait pas, mais des fois, elle craquait. Un spectacle de la sorte ne lui plaisait guère. Mais elle savait parfaitement que c'était la dure loi de la vie. Manger ou être mangé. Elle ne connaissait que trop bien ce proverbe lourd en conséquence. Il était en parti son guide. La louve revint à la réalité. Elle se trouvait en face d'un inconnu, qui avait en plus éliminé une grosse bestiole. Elle le regarda avec un air effarouché, nullement décidée à s'en aller. Elle se demandait en vain si il allait l'attaquer à son tour. Pourtant, plus elle le toise plus elle se rend compte qu'elle le connait. Cependant elle n'arrive pas à mettre la patte sur ce souvenir. Elle change d'attitude et met ses oreilles droit en avant. Elle sent encore la douleur de la course d'il y a quelques secondes. La femelle n'y prête guère attention. Elle est trop occupée à chercher dans sa mémoire qui est cet inconnu. Plus elle s'enfonce dans le passé, plus elle est proche de la solution. Elle tombe enfin sur ce qu'elle convoite. Elle se voit assise, tout sourire en train de lécher le front du loup. Elle fait de gros yeux et baisse la tête sur le côté en grognant. Trop affligée pour daigner donner une réponse au mâle. N'osant même pas fixer le loup, elle montra les dents. D'habitude, elle fuyait. Elle n'aimait pas parler ou donner des informations la concernant, depuis qu'elle était solitaire c'était comme ça. Elle releva la tête et plongea ses yeux bleus dans celui du mâle. " Je ne pense pas. " Elle avait souvent recourt au mensonge, ça ne lui faisait pas plaisir. Personne n'aime quand on ment. Mais là, c'était différent, ce souvenir humiliant et frustrant la perturbait tellement qu'elle ne voulait se rappeler et elle ne voulait pas que lui aussi se rappelle.

La louve blanche grognait faiblement, sans avoir à ouvrir la gueule. Elle montrait vivement que le rencontrer maintenant l'embêter. Elle jeta un coup d'oeil dans le ravin. Quand de nouveau elle se retourna vers lui, il l'appela par son nom. En voilà des mois et des mois qu'on ne l'avait prononcé. Sa première réaction fut de faire les gros yeux étonnés, comme si on disait à quelqu'un qu'à partir de maintenant il se nommait comme ça. Elle griffa le sol en se répétant un bon nombre de fois ce simple prénom. Aussi loin qu'elle se rappelle, on l'avait énoncé en la chassant d'un territoire. Elle gronda rien qu'à cette pensée. " Cela faisait un bout de temps qu'on ne m'avait plus appelé ainsi... " Sixtine pencha une oreille en arrière et l'autre en avant. Si cet inconnu s'en était souvenu, pourquoi elle n'arrivait pas à mettre la patte sur le sien. Le faisait-elle exprès ? Ou alors, elle n'avait pas trouvé cette rencontre intéressante et en avait du même coup, oublié le nom. Elle se souvint juste que cela commençait par Z. Peu commun en effet. " Et toi, t'es qui ? " Elle observa de bas en haut le corps du mâle. Se remémorant les détails qu'il représentait. La louve ne savait pas quelle attitude adoptée, fuyarde ou agressive ? Quand elle vit le sourire du loup, elle comprit parfaitement quoi faire. Même si ça faisait légèrement enfantin sur les bords, elle entra dans son jeu en affichant un semi-sourire narquois. Fixant ses yeux verts montrant une nuance bleutée avec intensité. Et les siens étaient bleus. Bleu saphir. Le vent souffla dans la fourrure blanche de la femelle. Se sentant plus en confiance, elle se décida enfin à incliner ses oreilles tout à l'avant. Cette expression aussi datait. Dans toute sa vie, il n'y avait eu que trois personnes, dont une morte, qui avait eu le droit à ça. Pour la plupart des loups, c'était leur visage habituel, mais pour Six' cela était rare.

La louve claire semblait légèrement perdue dans sa tête. Elle regarda le ciel espérant mieux se souvenir. Mais rien à faire. C'est comme si elle-même avait voulu effacer cette partie de sa mémoire. Il n'en restait que de vagues cauchemars et des rêves agréables. C'est bien connu, on n'a toujours du mal à se rappeler de quoi on a rêvé. Ces images d'elle avec lui la perturbaient et ce n'est pas en grognant qu'elles disparaîtraient. Elle essaya d'éviter son regard en se plongeant dans les nuages. Quand il ouvrit à nouveau la gueule pour répondre, elle se surprit à se demander pourquoi ils s'étaient quittés. Elle se répéta plusieurs fois son prénom dans sa tête. Zekary. Rien qu'à cette simple entente elle avait les joues en feu. Elle les frotta contre son poitrail. Ses yeux bleus trahissaient parfois ses pensées c'est pour ça qu'elle préféra les fermer un instant. " J'me souviens pas de tout et n'importe quoi, surtout quand ça commence à dater. Je préfère tourner la page, solution de facilité. " Elle écouta le murmure du vent dans ses oreilles et les remua instinctivement. Le mâle se mit à tourner autour d'elle. Elle se sentit très vite oppressée et gênée. Elle montra les crocs pour l'avertir que ça lui déplaisait. Sixtine avait l'impression d'être une proie pour lui. Car oui, c'est ce qu'elle faisait des fois. Cependant elle ne dit rien. Surement parce que ça lui donnait l'impression qu'il la draguait. Peut-être parce qu'après tout, elle avait ses chaleurs. Elle fit un grondement sourd qui se transforma en un gémissement. Puis elle se leva et interrompit Zekary. " Arrête. Ca me donne l'impression d'être ta proie. " Une petite goutte de pluie roula sur son front, ensuite deux, trois... Jusqu'à qu'une petite averse commence. Elle ne bougea pas et observa en silence le mâle. Elle fixa ses yeux vert-bleu. Ce moment était plutôt agréable...

La louve ramena sa queue à ses pattes. Comme pour se protéger. La pluie lui plaisait. A part le fiat d'être mouillée, cela lui donnait un certain air enjôleur. Elle mit ses oreilles à l'horizontal avec mécontentement. En réalité, elle était plutôt contente de le revoir, mais elle le cachait. Plutôt bien vu qu'elle se mentait à elle-même. Pourtant, une minuscule part de honte l'énervait. Elle l'observa intensément comme si elle voulait l'étriper. Ils étaient là, sous une averse, à moins d'un mètre l'un de l'autre. Zekary avait un sourire qui était d'habitude sur les babines de Sixtine. Rien que de voir cette tête triomphante et sournoise la frustrait. La louve avait jusqu'à maintenant, toujours été la prédatrice. Inverser les rôles l'embêtait au plus haut point. Elle écouta le son de sa voix répondre. Elle aurait voulu protester, mais que dire ? Quel argument choisir ? Du coup elle garda le silence et afficha un regard vraiment indifférent. Il l'a reluqué de bas en haut et de haut en bas avec ce même sourire charmeur. Sa deuxième réponse lui arracha presque un énorme grognement. Elle se contenta de montrer les crocs et d'affichait un regard assassin. " Sauf que moi je ne serai pas une proie comme les autres. Fait attention ou c'est moi qui risque de te dévorer. " Elle n'avait pas voulu dire le fond de sa pensée, et il était beaucoup plus poignant et plus cassant que ça. Peut-être par simple pitié ou alors dégoût. Elle se leva et s'approcha menaçante du mâle. Elle plaque son front contre les siens en montrant les crocs. " Ne joue pas au plus malin avec moi. "

La louve blanche dévoilait ses crocs avec hargne. Elle n'avait pas vraiment réfléchit à que faire sur le coup. Elle se rendit compte qu'elle n'aurait du répondre à aucunes de ses provocations. Mais maintenant, il n'était pas question de se défiler. Elle réfléchissait à tout va dans sa tête. Ce jeu qui avait mal débuté pour elle n'avait pas intérêt à continuer ainsi. Le fait qu'elle se trouvait face à Zekary l'avait juste perturbé,voilà d'où venait cette erreur. La pluie commença à devenir un peu moins dense. Le voilà qu'il continuait avec ce sourire et cette confiance en lui. Elle eut presque envie de cracher à ses pattes tellement elle en avait pitié. Sixtine finit par s'écarter. Non pas parce qu'elle cédait, mais parce qu'elle changeait d'attitude. La force ou les menaces ne faisaient rien sur lui, ça aussi elle l'avait oublié. Le seul sujet sensible était son frère... Elle ne préféra pas l'aborder à cause de sa blessure. Elle fit quelques pas en tournant en rond avec son sourire cynique et charmeur à la fois. " Non va-y explique-moi... " Ses yeux bleus se firent enjôleur et sa queue se balançait tranquillement. Elle fit un petit gémissement du à ses chaleurs à nouveau. Disons que pour elle, il était plus dur de se contrôler car elle était naturellement dragueuse. Encore là, elle hésitait sur le choix à faire. Finalement elle resta sur sa décision. De toute manière le jeu ne faisait que commencer. Ils avaient encore toute la journée pour s'expliquer. Elle s'arrêta juste en face de Zekary après avoir fait un tour. " Alors ? "

La louve observait avec attention ses yeux. Petite on lui avait raconté qu'ils enfermaient quantité de souvenirs. Elle fit un léger sourire à ce moment. Alors qu'elle commençait à sentir l'eau contre sa peau, il s'arrêta de pleuvoir. Elle se secoua et remua les oreilles. Zekary l'observait avec dégoût. Elle leva les yeux au ciel et soupira. * Il m'énerve... * Sixtine n'écouta même pas sa remarque. Elle se contentait d'observer le paysage. Un peu frustrée de s'être trompée deux fois à la suite, elle adopta son comportement normal. A savoir indifférente aux autres. Elle avait fait tant d'effort pour se montrer, un peu sociable avec lui. Il faut croire que ce n'était pas assez. Elle soupira et fit un regard indifférent à Zekary. La belle en avait assez de toujours se planter sur lui. Mais bon ce n'était pas sa faute non plus, les souvenirs lui revenaient mal, -et elle y était pour quelques choses-, et elle n'arrivait pas à mettre la patte sur au moins une discutions. Il y avait juste cette image d'elle et de lui qui persister. Qui s'accrochait et qui ne voulait s'en aller. Pourtant peu à peu elle s’atténuait. Son air enjôleur tomba de haut et devint froid et inaccessible. Ses yeux bleus se posèrent sur ce point invisible dans les yeux de Zekary. Elle aurait tant voulu pouvoir déchiffrer les gens comme ça... " Et ton frère il va bien ? " Elle en avait rien à foutre de son frère ou même de Zekary, mais il lui fallait bien un sujet de conversation. Elle guettait la réaction du mâle blanc, mais se lassa facilement et se lécha la patte avant droite. En réalité, Sixtine aurait voulu s'en aller, mais il venait de là sauver tout de même. Cependant elle n'allait quand même pas lui dire merci. Non, pas jusque là tout de même. Elle ne voulait surtout pas le remercier LUI. A quoi cela rimerait-il ? De toutes manières la plupart des paroles de notre chère louve ne sont que mensonge parmi tant d'autres.