C'était un soir effrayant. Peut être pas effrayant pour moi, mais le genre de soir qui effraye les petits louveteaux, niché au creux du cou de leur mère. Un soir où toute sorte de choses immondes et horribles se réveillent et hantent les âmes égarées. Un soir où quelques meurtres pourraient se passer, un soir où... La mort guette chaque recoin de ce monde. C'était également un bon soir pour méditer à ses erreurs passées, à ses remords, à broyer du noir. Et c'est ce que j'étais en train de faire en ce moment- même. Pourtant , dieu sait que je ne suis pas du genre à repenser aux fantômes du passé mais apparemment , ce soir faisait exception. J'étais en train de repenser à ce que j'avais commis... Involontairement, c'est certain mais je l'avais fait quand même. J'avais laissé brûler mes géniteurs, en décidant de sauver mon petit frère d'abord. Je me demande parfois, pourquoi je n'avais pas réagit plus tôt... Je me sentais si... Si minable. Mais, peut importe, c'est fait, je ne puis plus revenir en arrière, maintenant.

Je ne sais pas exactement pourquoi, mais mes pas m'ont guidé vers un endroit bien sinistre, que l'on nomme communément, Cimetière. J'avais cet endroit en répugnance et pourtant, je m'engouffrais dans l'ombre du lieu de repos des défunts.
Le croassement lointain d'un corbeau retentissait dans le noir. Un frisson me parcourut, comme si quelque chose ou quelqu'un m'observait dans le noir. Les reflets blafards de la lune sur les tombes m'aidait à déchiffrer les inscriptions sur les pierres tombales... Pourtant , je n'avais plus envie de rester ici. Quelque chose m'effrayait vraiment, quelque chose me fixait , là bas, dans l'ombre. Je tournai la tête et aperçu deux orbes bleus, d'une teinte triste, luisant dans le noir. Je fronçai les sourcils et m’avançai vers cette chose étrange, presque surnaturelle. Je couru presque et arrivai à hauteur du phénomène. Je découvris que c'était en fait, un loup.Ou bien une louve. Il avait le même pelage que moi, seulement ses yeux étaient d'une couleur presque effrayante, fantômatique... De plus, ce loup avait une odeur étrange, comme l'odeur de la mort, soit je me méfiai. Sur mes gardes, je me tenais à distance et lançai.

-Bonsoir. Que fais un loup ici, à cette heure, si je puis me permettre ?

La voix du loup, ou à priori de la louve, s’éleva, dans le silence figé du cimetière. Comme si elle avait fait repartir le temps, des oiseaux s'envolèrent au loin, comme effrayés. Elle dit :

- Il fait ici ce qu'il souhaite faire. Et une personne sensée ne le dérangerait pas.

Je fronçai les sourcils. Pour qui se prenait-elle , celle là ? D'humeur arrogante, je répondis, au taquet.

-Ça tombe bien, je ne suis pas une personne sensée.

La louve, croyant en avoir fini avec moi, décida de s'éloigner du cimetière. Je souris et la suivis.
Non mais, on ne se tirait pas comme ça, quand j'engageais une conversation ! C'est quoi cette mal politesse ? De toute façon, je me doutais bien que, ce n'était pas une personne qui en avait quelque chose à faire d'être poli ou non, d'être courtois ou non. Certainement pas, vu que son corps tout entier dégageait une odeur effrayante, une odeur qui me retournait le ventre. Comme une odeur de sang, de mort, de tout ce qu'il y a de plus abject. Sur ses talons, je lui demandai, posément.

-Vous n'aimez pas la compagnie d'autrui, n'est-il pas ?

Je souris sur ses mots et me doutait bien que la louve allait soit me donner un coup de patte bien mérité, soit me lancer une pique, bien méritée également. Je continuais mon chemin, toujours à la hauteur de la louve, mais un peu plus éloignée d'elle tout de même, pour voir comment elle allait réagir, même si dans le noir, il était difficile de discerner quoi que ce soit de concret. De nouveau un cri perçant déchira le silence pesant qui régnait. Comme un oiseau effrayé, ou quelque chose, je ne savais quoi, de torturer. Je ne m'en préoccupai pas, et presque amusé, j'attendais patiemment la réaction de la louve, me doutant que ça allait être sans doute, être négatif pour moi. Tant pis, ou tant mieux, il fallait que je me change les idées, car déjà, les fantômes du passé avait déserté mon âme.

Tandis que j'attendais la réaction de la louve, j'observais la nature qui vivait la nuit, les bruits tout autour de moi , qui ne m'effrayait guère... Non je ne dirais pas ça, ces bruits me fascinaient. J'étais fascinée par tous ces bruits qui interrompait le silence de la nuit. Puis une voix plus forte, plus menaçante, plus amer retentit. Je sursautai légèrement, surpris et vit qu'en réalité c'était la louve qui parlait.

- Bien deviné. Ce n'est pas que je ne l'apprécie pas, je dirais même que je la répugne. Surtout celle des Loups de ces Terres. Alors j’espère pour toi que tu n'est pas natif d'ici.

Wow, eh bien. Comme je m'en doutais cette louve n'appréciait guère la compagnie, enfin pour ne pas dire pas du tout. Apparement surtout celle des loups de cette terre. Elle dit qu'elle espérai pour moi que je n'étais pas né ici. Je le pris sous forme de question et répondit.

-Non, je ne suis pas d'ici. Si tu veux savoir avant nous étions solitaires, on errait dans la nature, on se trouvait des abris enfin ce , jusqu'au début de mon adolescence. Un incendie s'est déclanché , un jour, dans la forêt où nous résidions. Mes parents et mon frère était dans l'abris que nous avions déniché tandis que moi , j'étais parti chassé. Je suis revenu et j'ai vu de la fumée. Je suis alors allé voir et c'est la que j'ai vu que mes parents ainsi que mon frère , étaient pris au piège par des arbres en feu. J'ai d'abord sauvé le plus faible, mon frère, qui était plus petit que moi. Je n'en suis pas ressorti indemne. Alors comme à l'époque je n'étais qu'un adolescent, je n'ai pu faire plus et je me suis évanoui. Quand je me suis reveillé , mes parents avaient brûlés. J'ai pris mon frère, et j'ai décidé de venir ici pour qu'on puisse se reconstruire, en paix. Voila tout.

Je me doutais bien que tout cela ne l'intéressait sûrement pas, mais j'avais besoin d'en parler. Même si ce n'était pas la meilleure personne ni le meilleur moment pour en parler. Après avoir achevé les derniers mots, je m'éloignai un peu de la louve, et continuai de marcher, toujours à sa hauteur. Je repensai maintenant à l'expression d'horreur de mon frère quand je m'étais réveillé, lui suffoquant, sur le point de vomir et moi las, pathétique, devant le cadavre de nos parents. Je ne savais même pas ce qu'il était devenu, mon frère... Je soupirai et contemplai le ciel , qui semblait menacer de nous envelopper tellement il était noir...