Origami

Histoire

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L'aube pointait le bout de son nez. Le soleil réchauffait les terres désertiques qui se tenaient, pourtant fièrement, devant celui-ci. Les arbres baignaient dans la douce lueur orangée, chaleureuse, mais presque inexistante. Un vrai paysage digne de son nom, mais sans mouvement. Ou presque. Seul une ombre, esseulée, se traînait avec peine entre les arbres. Un souffle lourd, bien présent, régnait. Une petite louvette marchait depuis déjà cinq heures sans arrêt. Elle poussa un profond soupir et retomba à terre. Une nuée de sable s'envola dans l'air chaud, humide, mais encore supportable. Les yeux gris, presque blancs, de la louvette voulaient se fermer à jamais. Mais elle devait continuer, jusqu'à trouver de quoi satisfaire sa faim et sa soif. La petite se nommait Origami, et ce qui la différait des autres, c'est que sa vision du monde était différente. Au sens propre du terme: elle voyait en noir et blanc. Personne ne sût expliquer ça, ni sa famille, ni ses proches. Ils la craignaient. C'est pour cela qu'ils l'abandonnèrent, ne voyant aucune utilité à héberger une louve ne pouvant pas distinguer les couleurs. C'est pour cela qu'elle errait, seule, ou presque. Son frère l'avait suivie, étant trop attaché à elle. Mais leur amour n'était pas que fraternel, il était bien plus que ça. Ils ne pouvaient vivre l'un sans l'autre. Oui, vous avez bien compris: ils étaient amoureux. Entre frère et soeur. Déjà, si jeunes, oui. Mais vous savez, l'amour n'a pas d'âge: il survient d'un coup, comme ça, comme un oiseau voletant et passant devant vos yeux.

« Allez, lèves-toi. On a encore du chemin. »

La voix de son frère résonnait dans l'esprit d'Origami. Elle se leva d'un coup, et se tourna vers son frère. Entrouvrant les yeux, dérangés par la lumière, elle parvint à distinguer celui qui, selon elle, allait la soutenir au cours de sa vie. Elle poussa de nouveau un soupir, détourna la tête, et fixa l'horizon. Pour elle, le chemin était trop long, trop dur à supporter, trop désagréable. Impossible à accomplir. Non, ce n'était pas le chemin jusqu'à la nourriture, mais celui vers la destinée qui la dérangeait. La louve s'approcha de son frère, mais s'arrêta à environ un mètre. Leurs ombres se mêlèrent entre-elles. Origami le fixa un bon moment, jusqu'à ce qu'elle cligna répétitivement des yeux, pour évacuer la poussière de ceux-ci.

« Tu as raison. Mais toi, que fais-tu ici ? J'ai été virée du clan, pas toi. »

Le loup resta silencieux un moment. Il tourna ses oreilles vers sa soeur, et se baissa un peu, de sorte à ce qu'il puisse lui parler plus facilement. Il avait promis de la suivre. Toujours. À chaque voyage. À chaque pas. Il avait promis de la protéger, jusqu'à ce que son dernier soupir s'ensuive. Il l'aimait. L'adorait. Leurs âmes étaient comme attachées l'une à l'autre par un fil. Si l'un d'eux venait à nous quitter, l'autre n'hésitera pas, et le rejoindra.

« Je suis rattaché à toi. Je te protègerai jusqu'à la fin. »

Origami fini par lâcher un grognement. Les larmes, enfouies, se hâtaient de glisser le long de ses joues. La louve blanche gratta le sol poussiéreux de sa patte ensanglantée à cause de la longue marche. Elle planta son regard dans celui de son frère. Reculant doucement, elle murmura, d'un ton calme et posé, mais la voix tremblante:

« Tu as une vie. Et ce n'est pas la mienne. Nos chemins se séparent ici.»

Elle se retourna et parti. Les yeux rivés devant elle, la louve ne se retourna même pas pour faire ses adieux à son frère tant aimé, Seven. Celui-ci restait statique, immobile, choqué. Il se rendit compte qu'elle avait raison. Il avait une vie, alors pourquoi se mêler de celle des autres ? Oui, mais c'était sa soeur, tout de même ... Alors que Origami s'éloignait, la tête pleine de regrets, Seven murmura quelque chose pour lui.

« Jamais je ne t'oublierai. »

Mais sa soeur entendit, et répéta ses paroles. Ce qui la faisait encore plus différente des autres, c'était son ouïe bien plus développée. Chaque défaut a quelque chose qui le remplace.

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