Allongé en plein milieu de la Plaine aux Oiseaux, Faustin somnolait tranquillement, les yeux fermés sur le ciel bleu clair au-dessus de sa tête. Rien a foutre du Ciel, c'est certainement pas lui qui allait l'aider a grimper en grade. Il essayait de rêver depuis un bon quart d'heure ; et c'est avec horreur qu'il se rendait compte qu'il n'y parvenait pas. Ce n'était pas comme si il ne souhaitait pas rêver, seulement, a chaque fois qu'il pensait a quelque chose d'agréable, rien ne lui venait a l'esprit. Avec un grognement mécontent, il se roula plusieurs fois dans l'herbe tendre pour faire passer sa frustration, et fixa le Soleil au-dessus de sa tête, les yeux plissés. A tous les coups, c'était de la faute de ce foutu astre, qu'il n'arrivait pas a dormir correctement, comme tout le monde. Furieux, il se releva, et commença a courir en direction de l'horizon, dans le but fou et impossible d'attraper ce foutu Soleil. Ses pattes musclées frappaient puissamment le sol, tandis qu'il prenait une allure rapide, filant dans la Plaine tel une étoile filante, ses poils mixtes voletant doucement derrière lui, sa langue pendant hors de sa bouche, ses yeux sanglants brillants rivés sur le Soleil. Heureusement, quelques minutes plus tard, la fatigue eut raison de lui, et pantelant et haletant, il s'écroula de nouveau au sol, a la recherche de son souffle.

Il comprenait, par la douleur de ses muscles endoloris qu'il commençait a se faire vieux. Oui, il commençait a peine a le remarquer, et alors? Il était encore mieux conservé que la plupart des jeunots de ces Terres, mieux que Ken. Avec un soupir bruyant, il referma les yeux, songeant a des choses bien graves. Il devait désormais penser a son avenir, et pas seulement a sa Vengeance sur Kant et Paradox. Cette histoire le bouffait, aussi destructrice qu'une nuée de criquets sur un champ de maïs. Sa descendance, voilà le seul mot qui résonnait désormais dans son esprit. Il devait se trouver une Mère porteuse, a qui il ferait porter ses enfants. Seulement, il fallait encore trouver la bonne ; il ne souhaitait pas non plus devoir violer une Demoiselle consciemment. Quand même pas, sa déchéance n'irait certainement pas jusque-là. En même temps, ces bécasses de Femelle ne comprenaient généralement rien aux désirs des Mâles. Voyez-vous, la plupart du temps, ces derniers veulent juste un petit moment de plaisir, ou alors ils le veulent par nécessité, et encore, elles y trouvent a redire, en demandant a être aimées, choyées, et tout le tralala ! Mais ou va le monde, sérieusement ! Elles avaient bien un utérus, non, il leur servait a pas grand-chose, pour la plupart ! Irrité pour de bon par cette idée, il planta ses canines dans une touffe d'herbe qu'il mâchouilla lentement, la mine sombre.

La demoiselle se baladait par ici et par là. Etant évidémment une solitaire sa vie n'est pas rose quoiqu'elle la voyait ainsi. Elle se voulait princesse et trouver un mâle pour combler le vide qu'elle a en elle. Bien évidemment déterminée et séductrice la louve noire n'allait pas abandonner ses recherches. Et qui sait... peut-être qu'elle le trouverait enfin, son grand amour.
Rêveuse et insouciante, elle vagabondait dans les plaines, sur les territoires ennemis, en clair, elle allait la ou le vent la portait, même si elle se mettait dans des situations périlleuses, comme sa dernière maladresse d'avoir réveiller un ours et faillit se faire découper en rondelles. Elle soupira de sa propre bêtise. Maladresse ou non, Aurore n'est guère douée et hostile. Elle est tellement rêveuse et à la recherche de l'élu de son coeur, qu'elle en oublie presque la dur loi de la réalité. Aurore, Aurore... quand apprendras-tu à rester sage malgré que tu sois une adulte ? lui soufflait sa conscience mais la louve noire l'ignorait totalement. Elle ne se souciait que de son apparence et de sa fourrure douce comme de la soie.

La jeune louve s'avança et laissa la mélodie des oiseaux la bercer. Elle avait l'impression de flotter dans l'herbe tendre. Aurore continua sa route et vit au loin une espèce de boule. Elle se rapprocha et sentit l'odeur d'un mâle. Alors, c'était donc un loup. La demoiselle se fit coquette et se nettoya pendant quelques secondes avant d'aller voir le loup en question. Elle fit un beau sourire sur ses babines, heureuse de faire une rencontre. Sympathique ou pas ? Elle allait bien le voir de toute manière. Elle s'avance donc vers lui en silence.

Il était réveillé lorsqu'elle arriva. Disons qu'il la voyait déjà de loin, et qu'il avait eu beau tenter de se cacher derrière une touffe d'herbe, ça n'avait pas brillamment marché, puisqu'elle jetait des regards insistants dans sa direction. Curieux de comprendre ce qu'elle attendait au lieu de venir le voir, il avait relevé la tête, et ses yeux s'étaient arrondis comme des soucoupes en la voyant se lécher le pelage et se faire toute belle. Attendez, c'était pour lui, cette mise en scène, là? Merde, elle était bien mal tombée, celle-là ; si elle pensait tomber sur un mâle charmant et galant, elle allait rencontrer un véritable crapaud. Le prince charmant moderne de ces Demoiselles, eh oui eh oui. Finalement, après plusieurs longues minutes a se faire la toilette, la Demoiselle gambada dans sa direction, tandis qu'il se tassait inutilement au sol, derrière sa touffe d'herbe. Elle garda le silence, près de lui, et il fit de même. Ben quoi, il n'allait pas non plus l'accueillir a pa-pattes ouvertes ! Même si...allez, il devait faire un effort. Ou pas.

- Alors, le Pays des Merveilles, c'est sur la droite, et pour aller bouffer des arcs-en-ciel et chier des papillons avec les Licornes, c'est tout droit. Salut !

Il reposa sa tête au sol, un oeil fermé, mais l'autre ouvert pour observer la réaction de la Femelle, qui sans doute, n'allait pas hésiter a lui faire sa fête. Il allait s'amuser, encore une fois.

Toujours actif ?

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